Des araignées-loup en Isère ? Rien d'anormal !

Massive, rapide, et couverte de petites araignées accrochées à son dos : la lycose, ou araignée-loup, suscite l'épouvante et glace le sang des arachnophobes ! Souvent prise à tort pour une espèce exotique, elle est pourtant bien de chez nous. Effrayante, mais inoffensive !

Une grosse bête impressionnante… mais locale
Sa silhouette trapue, ses pattes robustes, et surtout, sa portée de petits juchés sur son dos, déclenchent souvent la panique — voire l’effroi — chez ceux qui la croisent dans leur jardin ou en bord de chemin. Certains l’imaginent dangereuse ou invasive. D’autres pensent avoir affaire à une "tarentule" venue d’ailleurs. En réalité, cette impressionnante araignée est une résidente bien ordinaire de notre territoire. Vous pouvez souvent la rencontrer sur vos terrasses ou devant la porte d'entrée en août, avec un abdomen impressionnant car elle s'apprête à pondre (souvent à la fin de l'été).
Présente dans toute l’Isère, l’araignée-loup est pourtant loin d’être une menace. Mieux : elle est une précieuse alliée de nos écosystèmes.

Une chasseuse au sol, sans toile ni piège
Le nom de "lycose", du grec lykos (loup), fait référence à son mode de chasse actif : elle ne tisse pas de toile, mais capture ses proies en se déplaçant au sol, tel un prédateur en maraude. Elle appartient à la grande famille des Lycosidae, présente de la Sibérie à l’Afrique du Nord.
Chez nous, la plus courante est Hogna radiata, aussi appelée "tarentule radiée". Ce nom, spectaculaire, est souvent mal compris : elle n’a rien à voir avec les vraies tarentules exotiques. Elle vit en milieu naturel, principalement dans les prairies ou les sols nus. Contrairement aux tégénaires ou aux zoropsis, elle ne cherche pas à s’installer dans nos maisons.

Une mère surprotectrice
Ce qui rend la lycose particulièrement impressionnante, c’est son instinct maternel unique dans le monde des araignées. Après avoir pondu ses œufs, la femelle les transporte dans un cocon qu’elle garde attaché à son abdomen. Puis, une fois éclos, elle continue de porter les jeunes sur son dos, jusqu’à ce qu’ils soient capables de se débrouiller seuls.
Une vision saisissante — et souvent dérangeante pour les non-initiés — que celle d’une araignée massive, noire et brune, grouillante de petits sur le dos. Pourtant, cette stratégie est tout à fait naturelle et sans danger pour l’être humain. Contrairement à certaines idées reçues, les petits ne dévorent pas leur mère. Et la lycose, qui peut mordre si on la manipule brutalement, n’attaque jamais.

Le rôle des lycoses dans la biodiversité
En tant que prédateurs d'insectes, les lycoses ont un rôle fondamental dans la régulation des petites bêtes qui pullulent dans les milieux ouverts. Et parfois, elles-mêmes sont la cible d'autres espèces étonnantes. Gilles Desrumaux, passionné d’entomologie et membre de l’association Rosalia à Grenoble, raconte une scène surprenante observée à Vaulnaveys :
« Je suivais une lycose pour la photographier quand j’ai aperçu un insecte étrange sur un poteau. Il ressemblait à une mante religieuse, mais c’était Mantispa styriaca. »
Cet insecte, peu connu du grand public, n’est pas apparenté aux mantes, bien qu’il leur ressemble. Il s’agit d’un cas de "convergence évolutive", où deux espèces très différentes développent les mêmes adaptations. « J'ai compris que la mantispe laisse tomber ses larves sur l'araignée-loup, pour parasiter le cocon et se nourrir des larves de l'araignée. », Une interaction rare mais fascinante, qui montre l’équilibre complexe entre espèces. « Finalement, tout se régule, tout seul ! », résume Gilles Desrumaux.

Une peur compréhensible, mais injustifiée
L’apparence de la lycose peut faire peur, et c’est normal : elle est grande, rapide, parfois vue de nuit, et ses petits peuvent créer un effet visuel "inquiétant". Mais comme beaucoup d’animaux mal aimés, elle souffre d’une mauvaise réputation injustifiée.
Ni dangereuse, ni envahissante, l’araignée-loup mérite surtout qu’on la regarde avec curiosité — ou qu’on la laisse tranquille. Alors si vous croisez cet été une Hogna radiata en balade, pas de panique : elle ne fait que passer...