« La neige rouge n’est pas une anomalie, c’est un signe de vie »

Alors que les premiers flocons blanchissent les sommets alpins, un phénomène inattendu intrigue chaque année au printemps, promeneurs et scientifiques : la neige rouge. Pollution ? Sable du Sahara ? Illusion visuelle ? Pas du tout. Pour Éric Maréchal, chercheur au CNRS et invité de l’émission "Le +" de TéléGrenoble, cette teinte surprenante est le résultat… d’une vie microscopique. Une réalité fascinante qu’il raconte à travers une conversation passionnante, entre rigueur scientifique, humour et mythes d’antan — avant de nous inviter à la découvrir dans la grande exposition "Rouge comme neige" au Muséum de Grenoble.

« Ce rouge, ce n’est pas une salissure, c’est une floraison »

Installé sur le plateau de TéléGrenoble, Éric Maréchal balaie les fausses explications les plus répandues. « Beaucoup pensent que c’est du sable du Sahara. Ce n’est pas complètement idiot : chaque année, des tonnes de poussières africaines tombent sur les Alpes. Mais elles donnent une teinte ocre, pas rouge. » La véritable responsable ? Une micro-algue. « Invisible à l’œil nu, elle produit un pigment rouge pour se protéger de la lumière intense. Quand elles se multiplient par millions, cela forme ce que l’on appelle des blooms. »

Une découverte saisonnière… mais bien réelle

Le phénomène n’apparaît pas en plein hiver, mais entre mai et août, lorsque la neige commence à fondre. « On ne la trouve qu’à partir de 2 000 mètres d’altitude », précise le chercheur. Loin de se contenter d’observation anecdotique, lui et son équipe prélèvent, séquencent, comparent : « On utilise les méthodes de la police scientifique, mais sur la neige ! »

Fake news polaires : quand la neige rouge « prouve » que la Terre est creuse

Le chercheur raconte une anecdote incroyable : « Au début du XXᵉ siècle, un livre anonyme affirmait que ces neiges rouges observées au Groenland étaient du pollen venu… de l’intérieur de la Terre. Conclusion : la planète était creuse ! »
Il sourit : « Les fake news existaient bien avant les réseaux sociaux. Dès qu’un phénomène dépasse nos connaissances, l’imaginaire s’emballe. » C ’est d’ailleurs l’un des objectifs de son travail : « Ramener les réalités scientifiques au grand public, avant que les fantasmes ne prennent le dessus. »

 Changer notre regard sur la montagne

Pour Éric Maréchal, cette neige colorée révèle un biais culturel : « On veut que la neige soit blanche, pure, immaculée. À peine elle change de couleur, on la juge sale. Pourtant, ce rouge, c’est la vie qui s’exprime. »
Son engagement est clair : « Il faut réconcilier les gens avec la nature telle qu’elle est, pas telle qu’on l’idéalise. »

Une exposition immersive à Grenoble : « Rouge comme neige »

Jusqu’en juillet 2026, le Muséum de Grenoble consacre une grande exposition à ce phénomène. Pensée comme une enquête scientifique et poétique, elle mêle microscopes anciens, prélèvements venus des expéditions arctiques, installations immersives, œuvres artistiques évolutives et récits de terrain. Le tout orchestré par Éric Maréchal lui-même, en collaboration avec le CNRS, Météo France, l’Université Grenoble Alpes et le Jardin du Lautaret. Une programmation riche complète la visite : ateliers, visites guidées, tables rondes avec des chercheurs, et même un espace où les visiteurs peuvent poser leurs propres questions.

👉 Retrouvez l'intégralité de l'émission avec Eric Maréchal en replay