Quand Mélenchon et Tondelier s’écharpent sur fond de législative à Grenoble

Le livre-enquête La Meute, signé par les journalistes Charlotte Belaïch (Libération) et Olivier Pérou (Le Monde), paru le 7 mai après deux années d’investigation, dresse un portrait au vitriol de Jean-Luc Mélenchon et du fonctionnement de La France Insoumise. Décrit comme un chef de clan autoritaire, le tribun n’hésiterait pas à recourir à la menace et à l’intimidation pour imposer ses choix. Parmi les exemples les plus édifiants figurent les coulisses de la législative partielle organisée cet hiver à Grenoble.

Une victoire éphémère

Retour en juillet 2024. À la surprise générale, le Nouveau Front Populaire remporte la 1ère circonscription de l’Isère, battant Olivier Véran, ministre emblématique du gouvernement Macron. Un succès symbolique pour la gauche, incarné par Hugo Prévost, 24 ans, jeune syndicaliste étudiant et militant de La France Insoumise.
Mais la lune de miel est de courte durée. Dès septembre, Hugo Prévost est rattrapé par de graves accusations de harcèlement moral et sexuel. LFI, tout comme sa collègue députée grenobloise Elisa Martin, se désolidarisent rapidement de lui. Prévost démissionne, déclenchant une élection partielle qui va mettre en exergue des tensions internes à gauche.

La candidature Castets, entre espoir et sabotage

Alors que la socialiste Amandine Germain, bien implantée localement, propose sa candidature, les états-majors nationaux préfèrent miser sur Lucie Castets voyant là une belle occasion de remettre dans le jeu celle qu'Emmanuel Macron n'avait pas voulu nommer Première Ministre pour la gauche pendant l'été. Elle représente une figure rassembleuse… mais indépendante. Et c’est précisément ce statut hors parti qui va poser problème.
La France Insoumise, désireuse de conserver cette circonscription dans son giron, exige que le ou la future députée siège dans son groupe à l’Assemblée Nationale. Lucie Castets refuse. Jean-Luc Mélenchon tranche alors sans ménagement : il torpille sa candidature et impose un autre profil, Lyess Louffok, militant engagé pour les droits de l’enfant, déjà candidat LFI dans le Val-de-Marne quelques mois plus tôt.

"Des méthodes de bourrins"

Une stratégie qualifiée par Marine Tondelier, qui soutenait l'option Castets, de « méthodes de bourrins ». Mais le plus marquant reste la réponse de Jean-Luc Mélenchon, révélée cette semaine dans le livre «  La Meute » et confirmée par la cheffe de file des écologistes : « On va te renvoyer la dose que tu mérites », lui a-t-il écrit. Une menace à peine voilée, symbole de la violence des rapports de force internes à la gauche.

Une fracture béante à gauche

Le 19 janvier, la gauche finit par perdre la circonscription grenobloise au profit de la macroniste Camille Galliard-Minier. Et les tensions entre La France Insoumise et ses alliés n’ont cessé depuis de s’accentuer. Cette nouvelle révélation ne va pas arranger les choses.

Malgré tout, certains gardent espoir, à l’image de la députée iséroise Cyrielle Chatelain, présidente du groupe écologiste à l’Assemblée Nationale invitée du QG Politique de téléGrenoble cette semaine : « Il faut continuer à discuter, à se parler. On ne peut pas laisser nos désaccords personnels détruire notre projet commun. Nous devons réussir à faire cette union pour les présidentielles que nous n'avons plus fait depuis bien trop longtemps. » Reste à savoir si cette union est encore possible avec Jean-Luc Mélenchon dans l'équation.